08-10-2006

Le Clémentinum et la rue Karlova dans la Vieille-Ville pragoise

Par Jaroslava Gissubelova

ClémentinumClémentinum Le complexe baroque du Clémentinum est le deuxième plus important complexe de bâtiments historiques à Prague, après le Château. Sa superficie occupe plus de deux hectares. Il s'étend non loin de la place de la Vieille-Ville, à mi-chemin entre cette place et le pont Charles. Il est visible de loin par sa dominante - une tour avec un observatoire. Le Clémentinum est le siège de la Bibliothèque nationale de la République tchèque. Ses fonds et ses collections comptent plus de 5 millions et demi d'ouvrages, dont 6 000 manuscrits de valeur, tel que le Code de Vysehrad de 1085, et 3 000 incunables.

La tour avec un observatoireLa tour avec un observatoire Le Clémentinum est devenu une bibliothèque après la suppression de l'ordre des jésuites, ses fondateurs, le 6 février 1777. Mais il n'y pas que la Bibliothèque qui est abritée dans le complexe du Clémentinum. Ce sont aussi trois églises, trois musées - celui des pendules de table, celui des instruments de l'astronome danois, Tycho Brahé, et celui de l'observatoire, puis une imposante salle des glaces qui sert de salle de concert. Mais un peu d'histoire, d'abord.

Le complexe du Clémentinum a été édifié sur plus d'un siècle, de la fin du 16ème à 1726. Il occupe l'emplacement d'un ancien couvent dominicain, donné aux jésuites à leur arrivée à Prague, en 1556, de trois églises et de plus d'une trentaine de maisons. Il possède trois entrées: deux principales - l'une donnant sur la place Krizovnicke, en face du pont Charles, l'autre sur la place Marianske, et une secondaire percée dans le très long mur longeant la rue Karlova.

C'est à l'Italien Francesco Caratti que les jésuites ont confié le soin d'élever leur premier collège à Prague. Donc après leur arrivée à Prague, en 1556, à l'invitation de l'empereur Ferdinand Ier de Habsbourg qui souhaitait restaurer le catholicisme tchèque et contrecarrer l'influence de l'Université pragoise utraquiste, les jésuites ont réussi à obtenir le couvent des dominicains et l'église Saint-Clément à laquelle l'on doit le nom du Clémentinum. Petit à petit, ils achetaient les bâtiments voisins et agrandissaient l'aire du Clémentinum, en y installant une école, une imprimerie et même un théâtre. L'éducation chez les jésuites est devenue une mode parmi l'aristocratie tchèque de l'époque.

Les bâtiments du Clémentinum se composent, pour l'essentiel, de quatre ailes centrales à l'intersection desquelles se dresse une tour d'observation. Ailes, disposées, quant à elles, autour de quatre cours intérieurs. Dans la première, on remarque la statue de l'Etudiant de Josef Max, édifiée à la mémoire des étudiants pragois qui, avec le jésuite Férus, défendaient la Vieille-Ville contre les Suédois, en 1648.

Au fond de cette première cour se trouvent les locaux de l'ancien collège jésuite, l'actuelle Bibliothèque nationale. Outre celle-ci, ils abritent également la bibliothèque universitaire et la bibliothèque slave. Plusieurs pièces ont gardé leur magnificence baroque: au premier étage, l'ancienne bibliothèque du collège, décorée de fresques figurant les Arts et les Sciences sur les voûtes et, au centre, d'un remarquable trompe-l'oeil. Dans l'aile donnant sur la rue Platnerska, la salle Mozart présente une riche ornementation rococo. L'ancien réfectoire d'été abrite aujourd'hui une grande salle de lecture décorée de tableaux de Krystof Tausch datés de 1710. Dans la deuxième cour se dresse une fontaine baroque et la tour de l'observatoire, construite en 1721 et remaniée en 1778 par Anselmo Lurago, avec au sommet la statue d'Atlas.

Dans la troisième cour se trouve la chapelle de l'Annonciation dite chapelle des Miroirs, en raison de son décor de stucs dans lesquels sont insérés des miroirs. Aujourd'hui, elle sert de salle de concert.

Les horreurs de la maison « Au puits d'or »

La maison 'Au puits d'or'La maison 'Au puits d'or' Près du pont Charles, au coin de la rue Seminarska et Karlova, se trouve la maison « Au puits d'or ». Ce nom lui revient depuis le XIVème siècle. A cette époque, les puits se construisaient dans les caves, par crainte d'empoisonnement par l'ennemi. Pour faire remonter l'eau dans la maison, il fallait donc descendre dans la cave.

Ainsi, un jour, une jeune servante est allée chercher de l'eau à la cave. En s'approchant du bord pour faire descendre son sceau, elle avait l'impression de voir des reflets dorés sur la surface. Curieuse, elle se penchait de plus en plus jusqu'à ce qu'elle perdit l'équilibre et tomba dans le puits. Bien évidemment, la jeune fille s'est noyée. Après l'avoir repêchée, il était indispensable de nettoyer le puits. Pendant le nettoyage, une des grosses pierres de la paroi du puits s'est détachée et dans le trou, on a trouvé une bourse bien garnie. Depuis, la maison porte son nom : « Au puits d'or ». Devenu riche, le propriétaire a déménagé et a complètement oublié la pauvre fille. Même après sa mort tragique, la servante noyée ne retrouva cependant pas son calme et errait la nuit, toute mouillée et malheureuse, dans la maison.

La maison « Au puits d'or » a changé beaucoup de propriétaires. L'un d'eux était confiseur. Souvent, il rencontrait deux revenants démunis de leurs têtes. Un chevalier en costume étranger et une jeune femme. Ils se baladaient dans les chambres, sur l'escalier et dans le couloir. Le confiseur ignorait qui ils étaient, mais comme ils ne le dérangeaient pas, il ne se posait pas trop de questions. Bon commerçant, il eut l'idée de reproduire les deux revenants en massepain.

Mais alors, il fallait leur faire également une tête, car il savait qu'aucun client n'achèterait une friandise décapitée. Comme il n'avait aucune idée de l'apparence des deux visages, tout simplement, il les inventa. Un jour, juste à la veille de Noël, le confiseur avait énormément de commandes et travaillait même la nuit. Minuit sonna et il vit apparaître devant lui les deux revenants. Cette fois-ci, les deux avaient leurs têtes? Le chevalier lui expliqua qu'ils étaient d'origine espagnole. Ils étaient venus à Prague, des années auparavant, pour récupérer un héritage qui leur revenait d'un des ancêtres du chevalier. Mission accomplie, ils avaient choisi la maison « Au puits d'or », où une auberge se trouvait à l'époque, pour y passer la nuit avant de repartir en Espagne.

L'aubergiste a découvert qu'ils étaient très riches et, au milieu de la nuit, les a assassinés pendant leur sommeil. Il leur a coupé les têtes, qu'il a jetées par la suite dans la Vltava. Les corps, ainsi que l'argent, ont été enfuis dans la cave sous l'escalier. Pour que leurs âmes retrouvent la paix, il fallait les enterrer convenablement et faire célébrer une messe à leurs intention. Par après, le confiseur serait heureux ainsi que sa famille et, de plus, retrouverait l'argent volé qui lui reviendrait. Le confiseur promit aux deux revenants de faire ce qu'ils demandaient et le couple s'évapora dans la nuit. Le matin, le confiseur est descendu dans la cave, sous l'escalier, muni d'une pioche. Après quelques instants de piochage, il découvrit les deux squelettes. Il exécuta sa promesse, fît enterrer le couple et célébrer la messe. En revenant chez lui il trouva le fameux escalier écroulé et sous les décombres, il trouva un trésor immense. Le confiseur est devenu très riche et, depuis, il faisait les figurines des deux revenants en massepain avec des visages fidèles aux portraits.

De nos jours, la maison « Au puits d'or » est un hôtel avec un restaurant, qui se trouve au sous-sol. Dans les locaux de l'ancienne cave donc. L'escalier tortueux est aujourd'hui condamné, mais encore, la nuit, on entend des pas? Eh oui, la maison est toujours hantée. Le fantôme qui traverse les couloirs est celui du garçon du magasin qui s'est tué justement sur l'escalier tortueux au début du XXème siècle.

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